VIEIL HOMME

tu sais bien, tu le sens bien que le temps passe

tu le sens qu’il est temps de laisser la place

tu ne connais plus ce monde dans ta glace

tu as du mal à le regarder en face

il se trémousse, tressaille et grimace

sous tes yeux ce vieux visage qui se froisse

de la vie il porte tellement de traces

que l’on doute qu’un de ces jours il s’efface

riche de tous les souvenirs qu’on amasse

de profonds sillons l’ont creusé dans la masse

des semailles pour des moissons qu’on entasse

puis gagnera la friche de guerre lasse

avant que l’ultime récolte se fasse

que ton nom sonne dans toute la paroisse

ouvre-nous grand les bras pour que l’on t’enlace

donne-nous tes récits pour qu’on se dépasse

même si tu le sais trop bien que le temps passe

que la faucheuse s’est déjà mise en chasse

reste encore avec nous un peu, soit loquace

autour du feu de la vie tu as ta place