Il regarde tout au loin là où s’en vont les bateaux
Les fils se rejoignent comme tissés par les vagues
Sur la mer des possibles que forme cet écheveau
C’est là que sa pensée, comme son regard, divague
Il aurait tellement envie de s’embarquer bientôt
Couper ses lourdes amarres avec une dague
Laisser tomber ses hardes, son fardeau, son paletot
Tout ce qui sur terre si férocement l’alpague
Son avenir ne lui est pas servi sur un plateau
Il le pêche par tout moyen, surtout par la drague
Dans ses filets serrés défaits par son large couteau
Il ne ramène le plus souvent que boue et algue
De sa porte, la chance ne franchit pas le linteau
Il se sait très loin de pouvoir embrasser sa bague
Car ici même les rêves, les mythes sont brutaux
Être content de sa vie, tu parles d’une blague
Les carcasses des vieux navires servent d’écriteau
Sur lesquels il s’amuse à dessiner, il tague
De si belles histoires qu’il voudrait vivre bientôt
Comme la petite sirène de Copenhague
Ainsi il s’est inventé sur le port et ses poteaux
Sa ligne de vie qui au long de ses dessins zigzague
Puisque ici il ne faut rien attendre de nouveau
Il a su s’inventer lui-même sa propre vague